Droit d’Enfance alerte sur la dégradation de la santé mentale des jeunes confiés à l’ASE
Dans des établissements déjà affectés par la crise globale que traverse la protection de l’enfance, le nombre de jeunes souffrant de handicaps et de troubles psychiques sévères ne cesse d’augmenter. Cette situation pèse en premier lieu sur ces enfants, faute de solutions adaptées à leur prise en charge, et sur des professionnels ne disposant pas des formations et des moyens adéquats pour y faire face. En effet, 75 % d’entre eux indique souffrir d’un manque de préparation dans la prise en charge de ces publics.
Une crise silencieuse : la santé mentale des enfants confiés à l’ASE en danger
Une situation d’autant plus préoccupante que les enfants confiés à l’ASE sont les premiers concernés par la dégradation de la santé mentale des jeunes observée en France : ils représenteraient 50% des jeunes hospitalisés en psychiatrie[1]. Plus inquiétant encore, de nombreux professionnels estiment qu’ils travaillent aux côtés d’enfants probablement porteurs de troubles ou de handicaps mais pour lesquels aucun diagnostic n’a été posé. En effet, le bilan de santé à l’entrée du dispositif ASE ne serait pas systématiquement réalisé dans 1/3 des départements[2] et celui-ci n’est que très rarement accompagné d’une évaluation psychologique.
Un retard dans la détection de ces troubles qui se conjugue avec un manque de réponses adaptées lorsque le constat est posé : le nombre de pédopsychiatres a diminué de 34% entre 2010 et 2022[3]. Ainsi, les temps d’attente peuvent atteindre plus de 3 ans dans certains départements pour obtenir un rendez-vous en CMP[4]. Les places dans des structures adaptées, du type DITEP restent, quant à elles, très largement insuffisantes et de nombreux établissements de protection de l’enfance n’intègrent aucun professionnel disposant d’une formation médicale ou paramédicale pour appuyer les équipes éducatives.
Droit d’Enfance appelle à un plan d’urgence pour la protection de l’enfance
Les témoignages des professionnels recueillis par Droit d’Enfance dessinent les contours d’une situation critique qui nécessite la mise en œuvre de réponses urgentes. En ce sens, la Fondation a créé un groupe pluridisciplinaire réunissant des professionnels de ses différents établissements pour élaborer des propositions à destination des pouvoirs publics. Cinq solutions ont d’ores-et-déjà été plébiscitées :
- Réaliser un bilan de santé mentale en plus du bilan physique prévu pour les enfants confiés à l’Aide Sociale à l’Enfance.
- Intégrer au moins un professionnel médical ou paramédical dans chaque établissement de protection de l’enfance.
- Inclure dans la formation des professionnels un enseignement spécifique concernant l’accompagnement d’enfants suivant un traitement médical ou ayant des pathologies d'ordre psychologique.
- Créer une unité d'intervention médicale mobile dédiée aux enfants confiés à l’ASE dans chaque département.
- Établir dans chaque département une cartographie des établissements médico-sociaux et des professionnels de santé pouvant accompagner des enfants confiés.
L’ensemble de ce travail sera présenté de façon exhaustive dans un document de plaidoyer qui paraîtra au début de l’année 2026. Celui-ci contiendra également les résultats d’une enquête actuellement menée auprès des acteurs de la protection de l’enfance afin de pouvoir dresser un tableau global de la situation et contribuer à la mise en œuvre d’un plan d’urgence pour la protection de l’enfance.
[1] Cour des comptes. LA PÉDOPSYCHIATRIE - Un accès et une offre de soins à réorganiser (Mars 2023).
[2] Observatoire National de l’Enfance en Danger. (2012). La santé des enfants accueillis en établissements de Protection de l’enfance : L’exemple de la Loire-Atlantique
[3] Cour des comptes. LA PÉDOPSYCHIATRIE - Un accès et une offre de soins à réorganiser (Mars 2023).
[4] GEPSo, ANMECS & CNAPE, op. cit., 1.